Souffrez-vous de fatigue compassionnelle ?
Souvent observée dans le cadre de l'exercice professionel, la fatigue compassionnelle désigne une forme d'épuisement psychique. Proche du burn out, ce phénomène encore trop méconnu se révèle d'autant plus inquiétant qu'il peut parfois se manifester sans crier gare.
Épuisement professionnel, surcharge émotionnelle, stress... Il existe différentes formes de fatigue psychique. L'une d'entre elles reste encore trop méconnue : la fatigue compassionnelle. Proche du burn-out, la fatigue compassionnelle est, comme son nom l'indique, étroitement liée au sentiment de compassion.
En quoi diffère-t-elle du burn out ?
Contrairement au burn out, cet état de détresse psychologique ne provient pas d'une situation de stress permanent ou d'angoisse, mais relève plutôt d'une surcharge émotionnelle intense. Le phénomène survient lorsqu'une personne se retrouve quotidiennement confrontée à la souffrance d'autrui. Charles Figley, professeur et directeur de l'Institut de Traumatologie de l'Université de Tulane (Nouvelle-Orléans, États-Unis) décrit la fatigue compassionnelle comme "un stress traumatique provoquant un état extrême de tension et de préoccupation généré par la souffrance de la personne à qui l'on vient en aide."
Qui est touché ?
En principe, toute personne qui se retrouve quotidiennement confrontée à la souffrance de l'autre, souvent dans le cadre de son travail. "La fatigue compassionnelle concerne essentiellement les gens qui sont dans une relation de soins ou d'empathie avec les bénéficiaires de leur travail, des soignants, beaucoup, des humanitaires, des journalistes. Elle cumule le burn out, et sur celui-ci vient se greffer une forme de traumatisme psychique", expliquait à France 2 le chercheur Philippe Zawieja, à l'occasion de la promotion de son ouvrage Le dictionnaire de la fatigue, paru en septembre 2016.
Comme le rapporte le site Mother Nature Network, 86,9% des intervenants d'urgence ont déclaré avoir des symptômes de fatigue compassionnelle après avoir été en relation avec des personnes ayant vécu des événements traumatisants. Une étude canadienne réalisée en Ontario en 2000 a révélé des niveaux élevés d'épuisement et de stress chez les travailleurs en oncologie. L'enquête avait révélé qu'un tiers d'entre eux envisageait de changer de secteur.
De quelle façon la fatigue compassionnelle se manifeste ?
Colère, dépression, apathie, faible estime de soi, irritabilité... La fatigue compassionnelle survient lorsqu'une personne est "à bout" et que sa charge émotionnelle l'empêche de continuer à mener sa vie comme elle le faisait avant. Un employé de refuge pour animaux ou une personne qui travaille dans un orphelinat peut par exemple commencer à ressentir une impression d'abandon à force de côtoyer des enfants ou des animaux qui ont été délaissés. À ce sentiment d'abandon, peut ensuite s'ajouter une sensation d'impuissance, qui conduira à l'isolement social. La fatigue compassionnelle peut s'aggraver lorsque l'environnement de travail n'est pas sain : pression de la part de ses collègues ou de ses supérieurs, harcèlement moral, etc...
Quelle prise en charge ?
Même si les symptômes de la fatigue compassionnelle peuvent considérablement varier en fonction de la personne qui en souffre, elle nécessite la plupart du temps une prise en charge médicale. "Par définition, la fatigue compassionnelle relève de la psychotraumatologie. Si ses ressources psychiques ne lui permettent pas de la surmonter, le salarié en souffrance devra recevoir l'aide du psychologue ou du médecin du travail qui l'orienteront, le cas échéant, vers la prise en charge psychothérapeutique la plus adaptée", précisent Philippe Zawieja et Franck Guarneri, auteurs de l'ouvrage Le dictionnaire des risques psychosciaux.